Gernicourt est un tout petit village du canton de Neufchâtel, assis sur les bords de l'Aisne qui doit sa renommée et son existence religieuse à Saint-Rigobert, archevêque de Reims. Ce digne prélat ayant reçu ce domaine des mains de Pépin, maire du palais d'Austrasie, s'était empressé d'y faire construire une église qu'il avait dédiée à Saint-Pierre et par tant de l'orner de plusieurs cloches. Mais il arriva qu'au commencement da VIII siècle, vers 721, le saint Pontife,injustement chassé de son siège par la violence de Charles Martel, avait dû se retirer en Gascogne, pays libre alors et placé en dehors de sa domination.
Un jour que le Saint, voulant utiliser pour sa sanctification les rigueurs de l'exil, était entré dans une église pour y faire sa prière, et assister au service divin, on se mit en devoir de sonner les cloches pour appeler les fidèles à l'office. Mais deux de ces cloches malgré tous les efforts des Cloquemans, ne rendirent aucun son. Alors, le prêtre et les assistants interrompent le saint personnage dans son oraison et lui demandent avec on certain embarras: qui il est ? d'où il vient? L'étranger, sans se donner à connaître, se contente de répondre qu'il est clerc et qu'il vient de France. Ceux-ci insistent et l'interrogent sur un événement qui les étonne; ils veulent savoir de lui pourquoi les cloches mises en branle à son arrivée, n'ont pas sonné aujourd'hui comme de coutume. – « Je l'ignore, reprit le saint. » Mais lorsque j'étais en France, deux cloches ont été enlevées successivement d'une de mes églises; peut-être seraient-ce celles-ci; montrez-les moi et je vous dirai si ce sont les ou d'autres.»
Et en effet dès qu'il les eut vues, il assura qu'elles étaient bien les siennes. Alors ayant tenu conseil avec le prêtre de la paroisse, ils remirent les cloches dans les tourillon d'où on les avait ôtées pour les examiner et dirent à l'homme de Dieu: « Venez et mettez-les en branle, afin que nous sachions si ce que vous dites est vrai. A peine le serviteur de Dieu les eut-il touchées que soudain elles rendent un son éclatant comme à l'ordinaire. Le peuple fut alors dans l'admiration et rendit gloire à Dieu. Tous jugent par ce fait de la dignité du saint personnage à qui on restitue ses cloches. Elles furent, disent les biographes, rapportées en France et replacées dans l'église de Gernicourt où elle sont restées longtemps comme un monument impérissable de ce fait extraordinaire.
