La légende des fées de Tourgueille [Saint-André-de-Valborgne (Gard)]

Publié le 20 octobre 2022 Thématiques: Fée , Jouer des tours , Pierre | Roche , Punition , Vol ,

Tourgueille
Tourgueille. Source Google Street View
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Source: Roux Henri / Revue des Traditions Populaires (1987) (2 minutes)
Lieu: Roche des fées à Tourgeuille / Saint-André-de-Valborgne / Gard / France
Motif: F271.4.3: Les fées filent F365.4: Une fée (bonga) vole une partie de la récolte F381.11: Les fées partent lorsqu'on leur confie des tâches impossibles à accomplir

A quelques kilomètres de Saint-André-de-Valborgne, sur une route nouvellement construite et qui conduit à Valleraugue, se trouve le petit village de Tourgueilles. Les montagnes l’enserrent de toutes parts; à peine s’ouvrent-elles au nord-ouest pour livrer passage au ruisseau à allures vives qui va mêler ses eaux à celles du Gardon, et à la route qui le côtoie.

La légende raconte que ce village et ses environs étaient autrefois hantés par les fées. Elles allaient souvent s’asseoir sur un certain rocher très élevé d’où l’on découvrait une portion de la vallée : ce rocher est désigné aujourd’hui sous le nom de Rocher des fées.

En amont du village, dans le lit à demi desséché d’un maigre ruisselet se jetant à son tour dans le ruisseau principal, on voyait jadis un énorme rocher pesant, au témoignage des habitants, plus de cinq cents quintaux. Les fées, assez peu soucieuses de cette circonstance, le mettaient le plus naturellement du monde au bout de leurs fuseaux lorsqu’il leur arrivait de filer. Un jour, cependant, leur force dut les trahir, car le bloc de granit roula dans le ruisseau dont il obstrue encore le cours : on le nomme le Codou blanc.

Honteuses de cette mésaventure, elles s’en prirent aux habitants. On les apercevait souvent la nuit, surtout en automne, dans les jardins, occupées à ramasser des haricots; et, lorsque par hasard quelqu’un, croyant avoir affaire à des voleurs, criait et mettait la main sur elles, elles disaient en patois : « Laïsso mèn ana, què ma mèro mi sonono », ce qui signifiait : « Laisse-moi partir, car ma mère m’appelle ». Ces paroles produisant un effet magique, les fées s’en allaient, en effet, sans qu’il fût possible de les retenir.

Un brave paysan avait particulièrement à se plaindre d’elles. Les fées allaient, la nuit, dans sa maison, faire la vaisselle, mais elles brisaient souvent les assiettes. Pour se délivrer de leurs visites importunes, le chef de la famille posa sur une chaise, avant de se coucher, un boisseau de millet. Quand les fées entrèrent, elles voulurent savoir ce que contenait cette mesure, mais elles s’y prirent d’une façon si maladroite qu’elles en renversèrent le contenu sur le plancher. Ne voulant pas se donner la peine de ramasser des grains aussi petits, elles s’en allèrent pour ne plus revenir.

Les fées maniaient les lourdes pierres de la montagne avec autant de facilité que si elles eussent été de la laine et les réunissaient en tas ou clapassés, qui existent encore. Pourtant elles virent la vertu de leur baguette magique diminuer peu à peu et alors les pierres ne leur parurent plus aussi légères. Elles disaient en les ramassant : – Hâtons-nous, car elles deviennent pesantes.


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