La légende du follet du château de Callac [Plumelec (Morbihan)]

Publié le 18 octobre 2022 Thématiques: Animal , Chant du coq , Château , Coq , Follet , Fuite , Gardien | Gardienne , Jouer des tours , Ruse ,

Château de Callac
Sdo216, CC BY-SA 4.0 , via Wikimedia Commons
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Source: Fouquet Alfred / Légendes, contes et chansons populaires du Morbihan (1857) (2 minutes)
Lieu: Château de Callac / Plumelec / Morbihan / France

Bien au delà de Brignac, et toujours au couchant, vois, mon ami, le château de Callac, qui cherche l'air et le soleil entre les vastes bois et les rochers schisteux qui l'entourent; il étale sur ses murs les cachets de divers âges, et s'est assis sur la voie même que nos dominateurs romains ont tracée de Rennes à Carhaix, il y a dix-huit siècles.

Un follet jadis résidait dans ce château, et, sans être méchant, il se permettait bien des malices, et lutinait surtout une vieille femme qui, tous les hivers, gardait seule le logis en l'absence des maîtres. Quand la vieille s'endormait au foyer, en filant sa quenouille, le lutin roulait de grosses boules dans la pièce supérieure, et la réveillait par peur du tonnerre, qu'elle redoutait beaucoup; d'autres fois il brouillait son fil, poussait au feu son fuseau, flambait sa filasse à la chandelle de résine, ou mettait force sel dans sa soupe de lait; d'autres fois encore, il dérangeait sa coiffe à pignon, nouait ses cheveux, ou lui traçait au charbon de belles moustaches noires; le malicieux follet se permit même, un soir, de lui rire au nez en lui passant au cou un grand trépied de fer.

L'insolence était un peu forte et la vieille gardienne jura de délivrer le château de cet hôte importun, non par violence, car elle craignait les représailles, mais par ruse. Elle alla trouver une de ses amies, qui passait pour être un peu sorcière, et, lui contant en gémissant les affreux tours qu'il lui jouait, elle lui demanda un bon conseil pour s'en débarrasser.

  • Toutes les nuits, dit la commère, les follets rôdent à leur caprice; mais, au premier chant du coq, tous doivent rentrer dans leurs demeures. Si donc vous pouvez donner au vôtre une occupation qu'il n'ait pas le temps de finir avant que le coq ait chanté, il fuira de dépit le château et n'y rentrera jamais..

-Grand merci, ma commère, dit la vieille gardienne, j'ai l'affaire de mon follet, et j'espère bien (si ce que vous me dites est vrai), que j'en serai bientôt débarrassée.

De retour le soir au château, la vieille place derrière la porte de sa cuisine une grande jatte de bois remplie à haut mulon de mil, et se couche aussitôt. Le follet arrive, pousse vivement la porte et renverse la jatte et son contenu... Aussitôt il se met en devoir de ramasser le mil avec ses petites mains et de l'entasser dans la jatte.... La besogne alla vite et bien tant que le follet put ramasser le mil à pleines mains; mais, dans leur chute, les grains de mil s'étaient répandus sur les planches, avaient glissé dans les interstices, et le malheureux follet fatiguait ses doigts et usait ses ongles à les recueillir un à un.

Pendant qu'il suait et s'évertuait à cette rude besogne, le coq chanta, et le follet, forcé de fuir, lança dans sa fureur le mil au nez de la vieille, qui ronflait; mais ce fut là son dernier méfait, car jamais, depuis, il ne reparut au château.


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