Au pied de la montagne de Chaillon, sur le bord de la route qui conduit du village d'Hyèvre-Paroisse à la petite ville de Clerval, il existait de temps immémorial un crucifix abrité sous un rocher. En 1793, dit une tradition locale, un jeune homme du pays, qui partait pour la guerre, s'avisa de briser les deux bras de ce Christ. Ses camarades, moins irrélieux que lui, lui reprochèrent vivement cet acte d'impiété : « Il t'arrivera malheur », lui dirent-ils; et leur prophétie ne tarda pas à se réaliser, car à la première bataille qui se livra sur la frontière, le malheureux jeune homme eut les deux bras emportés par la mitraille de l'ennemi. Alors il se souvint de ce qu'il avait fait et de la menace prophétique de ses camarades. Il n'hésita pas à reconnaître le châtiment du ciel dans cette mutilation subite et semblable à celle qu'il avait lui-même fait éprouver d'une manière si lâche et si brutale au grand Crucifix d'Hyèvre. Il se repentit de sa faute, et le prêtre auquel il la confessa le détermina pour la réparer à faire replacer, dès qu'il le pourrait, un Crucifix semblable à l'ancien sous la roche de Chaillon, ce qui eut lieu en effet peu de temps après.
Aujourd'hui, le Grand Crucifix d'Hyèvre est encore à la même place et depuis il n'a cessé d'être en grande vénération parmi les habitants de la contrée.