La légende du Pont de Curzon [Curzon (Vendée)]

Publié le 2 janvier 2023 Thématiques: Berger , Chant du coq , Construction , Construction de pont , Construction inachevée , Coq , Dolmen/Menhir , Fée , Fradet , Lutin , Protection , Punition , Reveil du coq ,

Le pont Désiré
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Source: Baudry Ferdinand (Abbé) / Annuaire départemental de la Société d'Emulation de la Vendée (1863) (2 minutes)
Lieu: Pont Désiré / Curzon / Vendée / France
Lieu: Pierre-Plate-du-Châtaignier (disparue) / Curzon / Vendée / France
ATU: 810A*: Le prêtre et le diable
Motif: F211.3: Les fées vivent sous la terre F252.2: La reine des fées F271.2.0.1: Les fées construisent de grandes structures en une nuit F330: Les fées reconnaissantes F360: Fées malveillantes ou destructrices (lutins)

Curzon, si on en croit la légende, fut longtemps une cité florissante, connue sous le nom de Curbon. Lorsqu'elle était baignée par les flots de la mer, ses navires et les barques de ses pêcheurs trouvaient un abri sûr dans son port, et dans l'anse où sont placées la Claye et Mortevieille (Mortua Villa antique villa gallo-romaine à 3 kilomètres en amont). Saint-Romain de Blaye (382 de J. C.), le célèbre patron des mariniers de la Gascogne, de la Saintonge et du Poitou, enrichissait à Curbon le prêtre qui desservait l'église qui lui était consacrée.

Les fées, de leur côté, avaient pris la ville en affection et y répandaient l'abondance. Leur reine, figure vénérable, disent les anciens, qui en imposait par sa mâle beauté et la majesté dont elle s'environnait, avait choisi pour palais les grottes et salles souterraines de la Pierre-Plate ; elle y habitait avec sa cour.

Un jour, une fée du Châteigner apparaît à un berger qui frappait avec sa houlette sur la Pierre-Plate. 
- Jeune homme, lui dit-elle, veux-tu aller tous les samedis au marché de Luçon chercher nos provisions de bouche ? Tu seras largement récompensé.
- Je le ferais volontiers, répond le berger; mais qui veillera, pendant mon absence, sur mon troupeau ? - Ne crains rien, reprit la fée, ton troupeau sera bien gardé. 

Le berger alléché par le prix, consentit à faire le voyage hebdomadaire. Le samedi matin, il venait à la pierre, où il trouvait un billet et des pièces d'or et d'argent, et le soir il déposait sur la même pierre les denrées qu'ils avait achetées. Pendant son trajet, l'herbe naissait sous les pieds du troupeau qui engraissait à vue d'oeil et qui demeurait immobile dans le pâturage.

D'autres fées peuplaient les souterrains-refuges dont le sous-sol du chef-lieu est sillonné. Mais, hélas ! l'ingratitude de ses habitants fut cause de sa perte et de son malheur.

Un jour la reine tint conseil, et décida que, la nuit suivante, les fées, dans l'intérêt de la population, construiraient en trois dornées de pierres, et avant le chant du coq, un pont qui, traversant l'immense vallée (3 kilomètre de large), où serpente présentement le Lay, couverte jadis des eaux de la mer, relierait Curbon avec Payré et Saint-Denis.

Un méchant homme, qui entendit donner cet ordre, en empêcha la complète exécution. Les fées n'avaient apporté qu'une dornée, que l'on montre au lieu dit les Platières, lorsqu'il força un coq de chanter avant l'heure; le pont resta inachevé.

Dans le même temps, un fradet de la cave des dixmes, près de la Motte, fut brûlé jusqu'au vif par le maitre du logis, dans la maison dite du Pilier (maison détruite en 1817), rendez-vous des belles fileuses. La fée, sa mère, jura de s'en venger. Un dernier attentat acheva d'exaspérer les fées. Un homme de Curbon tua un fradet dans la forêt de Payré. La fée de cette forêt en ayant prévenu immédiatement la reine de la Pierre-Plate, celle-ci prononça contre la cité l'anathême suivant, en présence de sa cour :

Démési Curbon,
P'tit ville en grand renom,
Tu t'app'l'ras Curzon.
Curzon, Curzounas,
Le sort en est jeté,
Chaque an tu varieras (diminueras)
D'in' maille et d'in dener (denier).

Curzon, depuis cette époque, a toujours été en déclinant. Toutes ses métairies ont été divisées ou vendues en détail. Un chevalier rouge enlève à minuit l'or amassé par le prêtre de Saint-Romain. « Un bruit de rames et de soupirs se fait entendre au port de la Claye, au moment de la pleine lune; une barque invisible se rend à Mortevieille et descend ensuite avec la marée vers la mer. »


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