Le pèlerinage de Notre-Dame du Charmaix est loin d’être négligé par les fidèles, et l’eût-il été depuis quelques années, que la foi nouvelle, qui s’attache au pieux sanctuaire, et le mouvement qui s’opère dans le monde chrétien en faveur de ces consolantes manifestations des saintes croyances, auraient suffi à tirer de l’oubli ce lieu saint, en faveur duquel la Vierge a montré une préférence trop flatteuse pour qu’il n’en soit pas tenu compte à jamais.
On sait que la sainte Vierge choisit à son gré les lieux où elle daigne apparaître, à plus forte raison choisit-elle les emplacements qu’elle désire voir consacrer à son culte. Et quand elle a choisi la place qui lui convient, elle n’aime pas qu’on l’en dérange.
Un pèlerin, revenant de la Terre-Sainte et traversant le col de la Roux, situé près de ce mont Thabor qu’on vient de perforer sous le nom de Mont-Cenis, se trouve surpris par une avalanche. Il invoque aussitôt la Vierge, et l’avalanche passe et s’écoule sans l’atteindre.
Il fonda, en actions de grâces, une chapelle sur le lieu même où il avait adressé à la Vierge la prière qui avait été si miraculeusement exaucée.
Mais cette chapelle était constamment menacée par un ruisseau, de ceux qui exercent de temps à autre de si grands ravages sur la voie ferrée qui parcourt la vallée, et elle risquait d’être renversée et engloutie un jour dans des eaux boueuses et irrésistibles. Les fidèles crurent à propos de transporter la chapelle ailleurs, sur un emplacement plus sûr et moins sujet aux inondations. Quand la nouvelle chapelle fut construite, on démolit l’ancienne. Mais, ô surprise le lendemain, l’ancienne chapelle reparut plus belle que jamais, et de la nouvelle, il ne restait pas trace. Il fallut bien reconnaître que la sainte Vierge se trouvait bien au bord de ces torrents si redoutables, par le fait sans doute qu’elle a de qui tenir pour mettre un frein au courroux des flots.