La légende des sept vierges d'Oberwesel [Oberwesel (Rhénanie-Palatinat / Allemagne)]

Publié le 9 mars 2023 Thématiques: Bateau , Château , Jeune fille , Mort , Naufrage , Noblesse , Noyade , Origine , Origine d'une roche , Origine d'un nom , Pierre | Roche , Princesse , Punition , Transformation , Transformation en pierre ,

Les Sept Vierges
Les Sept Vierges. Source Page Facebook d'Oberwesel
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Source: Kiefer F.J. / Légendes et traditions du Rhin de Bâle à Rotterdam (1868) (3 minutes)
Lieu: Sieben JungFrauen (Sept Vierges) / Oberwesel / Rhénanie-Palatinat / Allemagne
Lieu: Schönburg / Oberwesel / Rhénanie-Palatinat / Allemagne
Motif: D231: Transformation : homme en pierre

Sur une hauteur près d'Oberwesel est situé le château de Schönberg, jadis le siège d'une famille célèbre de ce nom, aujourd'hui tombé en ruine. C'est là que vivait autrefois un chevalier avec ses sept filles. Le destin n'ayant point voulu qu'il eût des descendants mâles, et lui, craignant l'extinction de sa race, se chagrina à tel point qu'il en gagna une maladie qui l'enleva trop tôt à ses enfants. L'éducation des demoiselles n'avait pas été soignée, car le père ayant perdu sa compagne à la naissance de la dernière fille, avait entièrement abandonné à une parente éloignée tout souci quant à ce point important; et celle-ci au lieu d'être une mère pour ses pupilles, n'avait cherché à développer en elles que vanité et que désir de plaire. La mort étant aussi venue leur enlever cette parente, toutes ces filles déjà grandes et parées de toute la fraîcheur de leur âge, se trouvèrent abandonnées à elles-mêmes. Comme des propriétés considérables dépendaient du château, il y eut nombre d'adorateurs qui venaient y tenter la fortune.

Mais les cœurs de ces orphelines ne semblaient pas vouloir s'ouvrir à des sentiments de tendresse. Cependant tout hôte était bien reçu, et pouvait même jouir de l'hospitalité tout à son gré; mais dès qu'il leur adressait une déclaration, il devenait l'objet de la risée et de la raillerie des châtelaines. Beaucoup de galants abandonnèrent, le cœur plein d'un juste ressentiment, le château et ses insensibles habitantes, mais la beauté et la fortune des jeunes filles attirèrent aussitôt de nouveaux aspirants, de façon qu'il y en eut toujours un bon nombre, et que les plaisirs et les festins ne faisaient pas défaut.

Les châtelaines avaient déjà joué pendant quelques années à ce jeu amusant, mais dangereux et criminel, et beaucoup de chevaliers de tous les pays, ayant été blessés au cœur par le Dieu volage, demeuraient encore auprès des sirènes, se flattant sans cesse de remporter la victoire sur leurs rivaux.

Un jour il y eut grande fête au château. Deux vaillants chevaliers se prirent d'une sérieuse querelle à propos de la dame de leur cœur, et leur querelle menaçait de se terminer par un sanglant duel. Les deux champions partout bien vus et considérés, attirèrent sur eux l'attention générale, à cause de leur subite animosité, et chacun des assistants s'empressa de les reconcilier. Il y eut, à cette occasion, plusieurs voix qui demandaient que les châtelaines se prononçassent en faveur de l'un ou de l'autre, afin qu'il n'y eût plus à l'avenir une dissention semblable. Cette proposition fut d'autant plus goûté que chacun se croyait le premier en cour auprès de celle qu'il entourait de ses prévenances. Les sept beautés enchanteresses furent donc instamment priées de se déclarer ouvertement, de fixer leur choix et de prendre un époux.

Il n'y eut plus moyen d'esquiver cette exigence générale, les demoiselles se virent contraintes de désigner le lendemain comme terme fatal pour le sort de leurs adorateurs.

Tous arrivèrent, à l'heure fixée, dans la grande salle de réception où ils étaient convoqués. Tous les yeux se portaient sur la porte qui devait s'ouvrir pour donner entrée aux sept divinités qui allaient ainsi annoncer heur ou malheur. Une suivante vint informer les chevaliers impatients que les demoiselles les attendaient dans un berceau du jardin près des bords du Rhin. Aussitôt tous les aspirants matrimoniaux se lèvent; mais quel est leur étonnement en voyant les belles dans un esquif qui s'éloignait déjà du rivage. L'ainée des coquettes se tenant sur la poupe adresse alors aux auditeurs ébahis le discours suivant: Aucune des nôtres ne fut onques d'avis d'aimer qui que ce soit d'entrevous, encore moins de se courber sous le joug du mariage. Nous n'aimons que notre liberté, nous l'aimons trop pour en faire abandon à des hommes qui voudraient nous réduire à l'esclavage. Tout en vous avouant que nous nous sommes raillées de votre crédulité, nous vous informons que nous allons quitter notre château pour longtemps. Nous allons habiter auprès d'une de nos tantes des Pays-Bas, espérant y continuer avec les chevaliers de ces contrées le manège dans lequel vous vous êtes laissés entraîner. Adieu donc, nos beaux seigneurs, adieu, ne vous chagrinez pas trop.

Ces paroles furent accompagnées des éclats de rire des sept sœurs, et l'embarcation partit. Les chevaliers honteux et déçus dans leurs espérances poursuivaient les coquettes de leurs regards courroucés, mais voilà que tout-à-coup s'élève une tempête, le batelet vacille de plus en plus fort, heurte avec violence contre un écueil et se brise, au même moment les flots entraînent les filles dans l'abîme.

A l'endroit même où cet évènement eut lieu, s'élevèrent, peu de temps après, au dessus de la surface du Rhin sept pointes de roche, qui s'appellent encore aujourd'hui les sept vierges, et qui sont un éternel avertissement pour les coquettes et un effroi pour les navigateurs.


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