Un soir de la Saint-Jean, une belle fille arriva chez la maîtresse de la maison Gorritepe au moment où le soleil allait se lever : « Bonjour, Marguerite; il vous faut venir sous la forêt; il y a là une femme en mal d'enfant, et vous devez l'assister. Et qui êtes-vous ? Je ne vous connais pas. Vous saurez qui je suis; mais, de grâce, venez tout de suite.
Je ne puis sortir maintenant de la maison; il faut que je prépare le déjeuner des faucheurs. Suivez-moi, de grâce; vous en serez sûrement très-contente; vous aurez votre fortune faite si vous nous aidez à mettre au monde cet enfant ».
Elle y consent, et toutes deux arrivent sous le bois. La fille donne à Marguerite une baguette et lui dit : « Frappez la terre ! ». Elle le fit de confiance, et en même temps un beau portail s'ouvrit devant elle. Après y être entrée, elle se trouva dans un beau château dont le dedans et le dehors brillaient comme le soleil : « N'ayez pas peur, Marguerite; nous y sommes ». Elles entrent dans une grande chambre qui était la plus belle de toutes. Là, il y avait une Lamigna sur le point d'accoucher et en mal d'enfant ; tout le tour de la chambre était garni de mignons petits êtres, tous assis et dont aucun ne bougeait jamais.
Marguerite fit son office et fut ensuite choyée autant que possible. On lui donna notamment d'un certain pain qui était blanc comme la neige.
Comme il commençait à faire tard, Marguerite voulut se retirer à la maison. La même jeune fille l'accompagna jusqu'au portail; mais elles ne purent jamais ouvrir la porte : -« Vous, vous aurez pris quelque chose ici ! lui dit sa compagne.
-Moi! rien, si ce n'est ce petit morceau de pain, pour montrer à ceux de chez nous comme il est beau !
-Mais vous devez le laisser ici ».
Elle le laisse, et à l'instant la porte s'ouvre.
« — Voici votre paiement, Marguerite; voici une poire d'or. Ne le dites jamais à personne, et cachez-la bien dans votre armoire. Tous les matins, vous trouverez une pile d'or à côté d'elle ».
Elle fit ainsi, et le lendemain matin elle alla voir et trouva la pile d'or, et aussi les lendemains suivants, pendant longtemps, si bien que, quoique cette maison fût toute chargée de dettes, ils payèrent tout et achetèrent en outre de grands biens.
Le mari en devint jaloux, et Marguerite, par amour pour la paix de son ménage, lui dit son secret. Pendant la nuit suivante, la poire disparut, et il ne s'en trouva plus trace.
II y a aujourd'hui encore dans cet endroit quelques trous qu'on appelle les trous des Lamignac.