La légende du serpent de Villedieu [Villedieu-lès-Bailleul (Orne)]

Publié le 25 février 2023 Thématiques: Animal , Cheval , Combat , Feu , Jeune fille , Monstre , Mort , Noblesse , Sacrifice , Serpent ,

Un étang a Villedieu
Un étang a Villedieu. Source Google Street Map
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Source: de Lonlay Eugène (marquis) / Légendes Normandes (1872) (2 minutes)
Lieu: Un étang à Villedieu / Villedieu-lès-Bailleul / Orne / France

Jeunes filles, au bois quand vous menez vos chèvres,
Évitez de passer seules près des halliers;
Voilez votre visage, n'entr'ouvrez point les lèvres:
C'est ici qu'habitaient jadis les templiers.

Au sein de a forêt où les elfes s'agitent,
Il est un vaste étang, recherché des corbeaux;
Le nénuphar y croit, les sarcelles y gîtent,
Mais rarement le ciel se mire dans ses eaux.

On trouve, à quelques pas de ce lieu solitaire,
Parmi les rochers gris qui lui font un rempart,
Une grotte, autrefois qui servait de repaire
A l'énorme serpent, un monstre tout à part.

Ce reptile exigeait des mères de famille,
Tous les ans, la légende est là pour le prouver,
Une cuve de lait et la plus fraiche fille
Que dans les environs on pouvait lui trouver.

Le sire de Bailleul, connu par sa vaillance,
Pour fiancée avait Hélène du Moncel,
Qui devait dans l'année être la redevance
Du monstre insatiable et froidement cruel.

En fidèle chrétien, la chose est démontrée,
Après s'être à l'évêque humblement confessé,
Le chevalier jura d'en purger la contrée,
Et voici le récit de ce qui s'est passé :

Aussitôt il revêt ses brassards, sa cuirasse,
Et recouvre de fer son vigoureux cheval,
Puis provoque le monstre, étonné de l'audace
De l'impudent qui tente un combat inégal.

Au milieu de l'étang dont les vagues bouillonnent,
Leur lutte sans répit est effroyable à voir :
Les feuilles et le sable ensemble tourbillonnent,
Et le vent fait voler les planches du lavoir.

Le soleil palissant se fond dans les ténèbres
Et dans l'obscurité qui règne aux alentours;
Les nocturnes oiseaux jettent leurs cris funèbres
Et viennent du castel peupler les hautes tours.

Le seigneur de Bailleul, ayant foi dans sa lame,
Pourfend d'un coup d'estoc la tête du serpent,
Qui vomit en mourant un cratère de flamme,
Dont la lave inonda les deux tiers d'un arpent.

De son souffle il atteint l'étalon à la queue,
Qu'on avait oublié de recouvrir d'acier,
Et l'on vit à l'instant, et de plus d'une lieue,
Le feu qui dévorait cheval et cavalier.

Jeunes filles, au bois quand vous menez vos chèvres,
Évitez de passer seules près des halliers;
Voilez votre visage, n'entr'ouvrez point les lèvres :
C'est ici qu'habitaient jadis les templiers.


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