Charnacé était en même temps seigneur de Bré Robert, en Noyant, et de la Bufferière en Méon. Lorsque l'on creusa la tranchée du chemin de fer, on trouva, dans un des souterrains qui avoisinent Bré Robert, une grande quantité d'ossements ; les habitants de la région voulurent y voir les restes des nombreuses victimes de cet autre Barbe-Bleue. On montre encore la place où se trouvaient les fameuses oubliettes dans lesquelles il faisait précipiter tous ceux qui lui déplaisaient.
Tous ces actes de Charnacé n' étaient pas sans lui valoir le ressentiment de toute la population et même des autres seigneurs. Pour échapper aux poursuites dirigées contre lui, et égarer les recherches, il faisait placer les fers de sa monture à l'envers.
La légende met à l'actif de Charnacé le même acte de cruauté que celui attribué au seigneur La Jaille, à Fougeré. Il enferma un jour, dans une salle de son château, un homme et un bœuf pour savoir lequel des deux vivrait le plus longtemps sans manger; il avait, au préalable, fait attacher au plafond de la salle un pain et une botte de foin. Le bœuf ne périt qu'au bout de sept jours et l'homme lui survécut de quarante-huit heures.
Les crimes de Charnacé devinrent si horribles et si nombreux que les autres seigneurs, ses voisins, honteux d'une telle barbarie, résolurent de le tuer.
Un jour le tyran avait invité ses voisins à un grand festin.
Au milieu du repas, la lourde table, maniée adroitement par les invités, bascula subitement et Charnacé se trouva pris dessous. Les seigneurs pesèrent alors de tout leur poids sur la table, et Charnacé, dans son agonie, demandait la seule grâce de pouvoir toucher du doigt, sa cape qu' il avait quittée avant de s'asseoir au milieu de ses invités. Cette faveur lui fut refusée, car tous savaient que c'était la possession de ce vêtement qui lui donnait sa cruauté.
Ainsi mourut le seigneur du Fresne, de Bré Robert et de la Bufferière.