Voyez-vous, là-bas, cette sombre forêt qui s'étend vers la France et dont les arbres furent peut-être plantés par des bénédictins, venus de la Calabre. Eh bien ! ce bois antique renferme les ruines de l'abbaye d'Orval, et sans doute plus d'un d'entre vous a heurté les pierres tumulaires jetées à droite et à gauche. L'abbaye d'Orval fut fondée par des religieux calabrais, c'est-à-dire, qu'ils étaient venus construire là une chapelle et quelques demeures particulières. La duchesse Mathilde, veuve de Godefroid le Bossu, duc de Lotharingie, vint dans ce pays et alla visiter la demeure des bénédictins étrangers. Arrivée au bord d'une fontaine, elle y plongea la main, et lorsqu'elle la retira elle vit que son anneau nuptial avait glissé de son doigt. Tout aussitôt elle adressa une prière à la Vierge, et vit soudain une truite qui nageait vers elle en tenant dans sa gueule l'anneau précieux. « Heureuse vallée, dit la duchesse, qui m'a rendu cet anneau d'or auquel je tenais tant! En mémoire et en reconnaissance de ce fait, je veux que ce vallon soit dorénavant appelé le val d'or. »
Voilà l'origine du mot Orval; quant à l'abbaye, elle dut sa construction aux libéralités de Mathilde et des comtes de Luxembourg: maintenant elle est en ruines; elle aura disparu complétement sous la mousse, que sa légende sera toujours fraîche et naïve.