Ceci est une légende qu'on rencontre un peu partout, voire même avec des variantes insignifiantes. Mais ici, c'est une noble personne, c'est une femme de haut lignage qui en est l'héroïne; cela suffit à lui donner un certain crédit de plus.
Le chevalier Aymon de Blonay, fondateur du château de Saint-Paul (dans la vallée d'Abondance), avait reçu l'inféodation de la terre de Saint-Paul du comte Aymon de Faucigny, vers le milieu du XII° siècle.
La jeune épouse de l'un des châtelains de Saint-Paul venait d'être inhumée dans le caveau funéraire de ses ancêtres. Le soir même de la triste cérémonie, le baron, seul dans son appartement, se livrait à la plus profonde douleur. Tout à coup, au milieu du silence de la nuit, on frappe à sa porte. Il tressaille, et dans le trouble qui s'empare de lui, il s'écrie : - Mon Dieu ! c'est de cette manière qu'elle heurtait habituellement. Ne serait-elle donc pas morte?
En effet, la porte s'ouvre et la défunte châtelaine se montre enveloppée de son funèbre linceul !
Il paraît que les gens chargés de l'ensevelir lui avaient laissé au doigt un anneau, et que ce bijou éveilla la cupidité de l'un des domestiques de la maison. Une fois la nuit venue, celui-ci s'était glissé dans la chapelle, puis, pénétrant dans le caveau sépulcral, il avait, pour s'emparer de la bague, coupé le doigt de la baronne.
Réveillée par cet odieux attentat de la léthargie dans laquelle elle était seulement plongée, la baronne se dressa subitement de toute sa hauteur. A cet aspect, le coupable, épouvanté, prit la fuite, et la morte par erreur rentra vivante au château.