La maison de Blonay, représentée aujourd’hui par le chef de l’administration municipale d’Evian, a son berceau dans le pays de Vaud. Mais elle est née deux fois, car il en existe deux branches très distinctes, dont l’une s’est ralliée à la religion réformée et dont l’autre a conservé la foi catholique. Celle-ci s’est fait un nouveau berceau, comme Marion s’était refait une virginité. Ce nouveau berceau, c’est le château qui se trouve au-dessous de Maxilly et de Lugrin, sur la rive du lac. En voilà un, de château, qui ne manque pas de légendes, sans parler des incendies singuliers dont il a été le théâtre, il y a quelques années !

C’est une grosse et lourde masse carrée accotée d’une tourelle élancée. Cette antique demeure seigneuriale est aujourd’hui dégradée, mutilée, ruinée, et ses nobles seigneurs ont cédé la place à d’humbles villageois.

A quelques pas de cette ruine féodale, de l’autre côté de la route, sur le galet du lac, existe une autre ruine dont la construction rappelle assez bien une chapelle, et dans laquelle vous voyez des filets de pêcheurs appendus aux murailles et attendant d’être tirés de là pour remplir leur ichtyologique mission. Cette ruine qui s’appelle la chapelle de Blonay, fut dédiée à saint André, patron des pêcheurs, comme on voit. A cette chapelle s’attache une légende, et c’est celle légende que nous allons conter […].

Un seigneur de Blonay faisait partie de la garnison qui occupait le château de Chillon assailli par les troupes bernoises. Voyant que la place, cernée de près par l’ennemi, allait être enlevée de vive force, de Blonay se précipite à cheval dans le lac et traverse à la nage les trois lieues qui le séparaient du Chablais, où, cheval et cavalier brisés de fatigue, ont le bonheur d’aborder sains et saufs. C’est au point même où ces deux émigrés mirent pied à terre que s’élève la chapelle de saint André.

La légende ajoute que le cheval, écumant en touchant la rive, perdit un de ses fers dans le gravier sur lequel il s’abattit, et que le lendemain on vit jaillir à cet endroit une source d’eau ferrugineuse à laquelle on attribua bientôt de merveilleuses propriétés.

Ce seigneur, en faveur duquel la Providence a manifesté une si efficace protection, est devenu la souche de la famille de Blonay […].