La légende du cheval D’Arbusigny [Arbusigny (Haute-Savoie)]

Publié le 2 janvier 2024 Thématiques: Animal , Cheval , Christianisation , Déluge , Empreinte , Empreinte dans la roche , Légende chrétienne , Pierre | Roche , Punition ,

Etude de Gericault
Etude de Gericault. Source Gallica
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Source: Dessaix Antony / Légendes et Trad. Pop. de la Haute-Savoie (1875) (2 minutes)
Lieu: Le pas du cheval / Arbusigny / Haute-Savoie / France

La grande plaine qui s’étend entre Reignier, l’Arve, la chaîne des Bornes et les montagnes de Saint-Sixt renferme une quantité prodigieuse de blocs erratiques, déposés par les glaciers à mesure qu’ils se retiraient. Ce sont là les témoins les plus accrédités de l’époque glaciaire. Il va sans dire qu’ils furent utilisés par les Druides et que plusieurs d’entre eux servirent aux sacrifices.

Chacun de ces blocs a sa dénomination : la Pierre aux Morts, la Pierre aux Fées, la Pierre du Trésor, la Roche du Diable, le Pas du Cheval, etc. Celle-ci est la plus rapprochée du village d’Arbusigny, et voici ce qu’on rapporte sur son compte:

Noé avait construit son arche et introduit dans cet immense réceptacle un couple de toutes les espèces d’animaux, ainsi que l’avait ordonné le Seigneur. Ceux qui y avaient trouvé place étaient les privilégiés, les aristocrates de l’époque; les autres étaient les prolétaires, les victimes de la société. Tous ceux-ci étaient condamnés à mourir dans les eaux, et le jugement reçut son entière exécution.

Mais bon nombre de ces malheureux se débattirent de leur mieux, disputèrent leur vie aux flots envahissants, déployèrent d’étranges adresses à se procurer des abris qui ne pouvaient les défendre qu’un instant, e finirent néanmoins par se résigner à la fin qui leur était réservée.

Un cheval, un malheureux cheval, voyant l’eau couvrir son sabot et gagner son paturon, se réfugia sur la pierre d’Arbusigny, et se crut dès lors à l’abri de toute atteinte. Combien d’hommes eussent voulu atteindre sa croupe ! Mais il s’en défendait avec toute la rigueur de l’égoïsme. Il frappait de ses deux pieds de derrière ceux qui s’approchaient d’un coté, et mordait ceux qui grimpaient de l’autre. Tant est qu’à ce manège ses fers laissèrent dans la pierre de profondes empreintes qui se voient encore.

Néanmoins, cet abri où il se croyait en sûreté finit par être envahi par les eaux vengeresses des atteintes portées à la divinité par l’humanité coupable. L’eau montait toujours; le sabot du cheval fut de nouveau couvert, le paturon après, et bientôt la croupe toute entière. Tout y passa, et le cheval qui, tout au moins, s’était rendu coupable d’égoïsme, fut à son tour englouti vivant dans les flots de la colère de Dieu.


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