La légende du fantôme du château de Vanel [Rougemont (Canton de Vaud / Suisse)]

Publié le 10 août 2023 Thématiques: Château , Cochon , Combat , Eternuement , Famine , Fantôme , Libération , Lieu hanté , Malédiction , Minuit , Noblesse , Nuit , Revenant , Ruse , Siège ,

Ruines du château de Vanel en 1934
Ruines du château de Vanel en 1934. Source www.swisscastles.ch
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Source: Cérésole, Alfred / Légendes des Alpes vaudoises (1885) (2 minutes)
Lieu: Château de Vanel (ruines) / Rougemont / Canton de Vaud / Suisse

[château du Vanel], dont il ne reste plus qu'une tour en ruine, servait autrefois de demeure seigneuriale à la branche cadette de la maison de Gruyère. Il occupait une situation admirable sur une arête rocheuse (de là son nom de vanel ou vanil, roche) et commandait le passage du Simmenthal au Pays d'Enhaut.

La seule route alors praticable passait dans l'enceinte du château et mettait les voyageurs à la merci de ses habitants. Lieu de refuge à l'occasion, cette forteresse servait le plus souvent à cacher le butin enlevé aux ennemis d'alentour. Ainsi, en 1331, Pierre du Vanel dut comparaître devant le comte de Savoie pour des déprédations commises par ses gens sur des montagnards voisins, sujets de Berne, et surtout pour une grande razzia de bétail que les plaignants n'estimaient pas à moins de deux mille livres, soit environ quarante mille francs. Le comte de Savoie lui laissa son château, mais lui fit payer huit cents livres.

Il paraît qu'un jour, dit la tradition, ce château fut longuement assiégé par les Savoyards; il allait succomber à la famine. Les assiégeants, qui avaient pillé la contrée et réuni beaucoup de bétail, firent un matin paître par dérision un troupeau de porcs devant les murs du donjon, sous les yeux de la garnison affamée. Tout à coup, un des soldats du fort ouvre la poterne, pousse le cri bien connu : « Hoo, hoo! » et tout le troupeau grognant se précipite dans l'enceinte fortifiée, où il apporte un renfort de vivres qui met le château pour longtemps à l'abri de la famine.

Depuis que le château du Vanel eut été détruit, en 1349, par les Bernois, depuis que ce nid de pillards ne put plus servir d'habitation, celui qui jadis passait à minuit au pied de ces murailles entendait régulièrement, à travers bois, dans la direction de cette tour lézardée, des éternuements répétés. C'était l'esprit d'un des seigneurs du Vanel qui, pour ses déprédations, était condamné à errer, sans trêve ni repos, jusqu'au moment où, dans ces lieux témoins de ses cruautés, il entendrait la voix d'un vivant lui adresser un bon souhait.

Or, un soir, quelques montagnards causaient du revenant du Vanel dans un cabaret voisin, à Rougemont. Un vigoureux gars, entendant cette histoire, fit le pari d'aller de suite s'assurer de la vérité des faits qu'on venait de lui conter. Au coup de minuit, il fut au pied du vieux manoir. Il attend. Il écoute. Tout à coup, un formidable éternuement retentit dans le silence de la nuit. Les hiboux effrayés s'enfuient. Les corbeaux s'éveillent. Les chouettes crient. Sans perdre sa présence d'esprit, notre montagnard jeta ces mots aux échos du Vanel:
– A vos souhaits! Que Dieu vous bénisse ! – Grand merci! lui répondit aussitôt une voix caverneuse. Voici plus de six cents ans que j'attendais cette parole! Le revenant délivré ne reparut plus.


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