La légende de la ferme du Diable de Seru [Ribemont (Aisne)]

Publié le 4 mars 2024 Thématiques: Âme , Animal , Chant du coq , Construction inachevée , Destruction , Diable , Diable constructeur , Diable roulé , Ferme , Nuit , Pacte avec le Diable , Paysan ,

Seru
Seru. Source Courrier Picard
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Source: Poquet, Alexandre / Les légendes historiques du département de l'Aisne (1879) (2 minutes)
Contributeur: Fabien
Lieu: Seru / Ribemont / Aisne / France

La ferme de Seru possédait encore il y a quelques années une antique grange qu'on disait bâtie par le diable, et dont le pignon n'avait jamais été complétement terminé. Voici, dit M. Gomart, ce que l'on raconte sur son étonnante construction. (Histoire de Ribemont, page 169.)

« A la suite des guerres avec les Anglais qui ont laissé tant de ruines dans la Picardie et le Vermandois, la ferme de Seru avait été incendiée et entièrement détruite. Le fermier s'acheminait un soir vers les débris de sa ferme, la tristesse dans l'âme, et maudissant la guerre et les soldats. Il était si malheureux que tout en se parlant à lui-même, il s'était plusieurs fois donné au diable, lorsqu'il rencontra par hasard un cavalier aux lèvres pincées, dont le visage, impassible, comme un masque de cire, le fit penser au diable. Les circonstances, le lieu, la solitude, les bruits étranges de la forêt avaient rempli l'âme du pauvre fermier d'une croyance surnaturelle telle qu'il s'imagina voir dans la personne du cavalier le diable qui venait lui offrir son secours. Cette pensée lui parut une certitude lorsque le cavalier, s'étant arrêté, lui demanda la cause de son désespoir et de ses gémissements. Le fermier, après lui avoir exposé sa ruine et sa misère, tombe à ses pieds et lui donne l'assurance qu'il se donnerait à lui corps et âme s'il voulait reconstruire sa grange; l'homme noir accepta et le fermier signa un pacte à la condition que la grange serait achevée la nuit même avant le chant du coq. »

Rentré chez lui le fermier regretta son marché. Mais déjà on entendait un bruit étrange dans la cour, et les murs de la grange s'élevaient comme par enchantement. Sa femme entendant les soupirs de son mari, lui demanda la cause de son insomnie. Celui-ci, après bien des hésitations, lui raconta son entretien avec l'homme noir, la vente qu'il avait faite de son âme à la condition que a grange serait construite et terminée avant le chant du coq. La femme gémit d'abord avec son mari, mais bientôt elle sécha ses larmes et ayant allumé une lanterne, elle courut résolument au poulailler dans lequel elle réveilla les coqs qui, voyant la lumière, se mirent à chanter.

Immédiatement les agents du diable qui n'avaient plus qu'un pignon å terminer, se sauvèrent précipitamment en passant par un sentier qui se dirigeait vers les carrières d'Origny-Sainte-Benoite et par où ils avaient apporté les matériaux de la grange. Ce sentier qui porte encore aujourd'hui le nom de Voie du Diable a, dit-on, longtemps conservé les empreintes des suppôts de Satan. Cependant ni lui, ni ses successeurs ne purent jamais faire achever le pignon de la grange. Il était plus facile de la détruire et elle l'a été de nouveau. C'est une aventure de ce genre qui a donné lieu au dicton femme plus maligne que le Diable, C'est du moins un sobriquet qu'on applique plus communément aux personnes d'Ecly et aux femmes de Sery, en Ardennes, où des faits semblables se sont passés. On montre encore à Sery une large butte appelée le Mont des Sorciers.


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