Sur l'emplacement de l'église actuelle de St-Vulfran s'élevait primitivement une église dédiée à St-Firmin, qui, un beau jour, disparut entièrement sous l'eau. Un nouvel édifice fut élevé, qui eut pour patron St-Vulfran au lieu de St-Firmin; celui-ci se vengea de son successeur et de ses anciens paroissiens en faisant entraîner par la Somme les pierres des fondations de la nouvelle église, de sorte qu'elle eut le même sort que celle qu'elle avait remplacée.
La construction d'une troisième église fut alors décidée et, pour éviter de nouveaux malheurs, les clercs s'assemblerent pour aviser aux moyens à prendre. Un vieil ermite proposa de placer la future église sous le vocable de St-Firmin; les clercs firent observer qu'en agissant de la sorte, on s'attirerait la colère de St-Vulfran. Un théologien fort habile mit tout le monde d'accord en proposant de conserver St-Vulfran comme patron et de placer l'une des tours sous l'invocation de St-Firmin.
Mais voici ce qui se passa : « Lorsque St-Vulfran fut entré en possession de son église et St-Firmin de sa tour, une mésintelligence sourde ne tarda pas å se révéler entre eux.
St-Firmin devint plus que jamais jaloux de son grand voisin, qui avait deux tours et de grosses cloches dont il l'étourdissait jour et nuit. Peu à peu, il tendit à détacher du corps de l'édifice la partie qui lui en appartenait et de grandes fissures se déclarèrent dans la maçonnerie ». Mais, comme, sur les conseils de St-Vulfran, la tour de St-Firmin se trouvait prés de la rivière, il arriva que ce dernier se vit « fort empêché lorsque, après avoir séparé sa tour de l'église, il reconnut qu'elle penchait au-dessus de l'eau et qu'il serait la première victime de la rupture du traité ». St-Firmin s'arrêta donc dans son oeuvre et l'on voit encore aujourd'hui sa tour qui s'incline sur la Somme.