La légende du chien rouge de PlanFayon [Plaffeien / Sense District / Suisse]

Publié le 13 juin 2025 Thématiques: Animal , Bénédiction , Chien , Disparition , Fantôme , Grotte , Lieu hanté , Nuit , Origine , Transformation ,

Chien rouge fantôme
Chien rouge fantôme. Source Midjourney
ajouter aux favoris Ajouter une alerte en cas de modification augmenter la taille du texte reduire la taille du texte
Source: Genoud, J. / Légendes fribourgeoises (1892) (3 minutes)
Contributeur: Fabien
Lieu: Hauteurs de PlanFayon / Plaffeien / Sense District / Suisse

Il y a longtemps, car c'était vers la fin du dix-septième siècle, un affreux fantôme avait établi son quartier général sur les routes et passages qui conduisent de Bourguillon à la Haute-Pierre, non loin de la Singine chaude. Son repaire de prédilection était une sombre caverne, au-dessus de Planfayon. Inoffensif envers quiconque le laissait en paix, il devenait terrible pour ceux qui l'attaquaient. On l'appelait tantôt Nachthund ou chien nocturne, tantôt Gassentœtscher ou pataugeur.

Par une soirée d'automne, alors qu'une brume épaisse descendait de la montagne, deux rôdeurs attardés sortent bruyamment de l'Alpenklub, la principale auberge du village. Bras dessus, bras dessous, ils trébuchent à l'envi. A peine sont-ils arrivés devant la fontaine communale qu'un horrible monstre, un chien terrible, à la gueule flamboyante et aux yeux étincelants, se présente à leurs regards troublés. Effrayés, les deux buveurs s'arrêtent et attendent. Mais l'étrange animal reste immobile.

« Hé! Gassentoetscher, lui crient-ils un peu rassurés, as-tu encore soif? Voyons, laisse-nous passer ! »

Pour toute réponse, le chien rouge car c'était lui leur montre une gueule enflammée, prête à les dévorer. Consternés, éperdus, les deux malheureux détournent la tête et cherchent leur salut dans la fuite.

Soudain, un taureau furieux, mugissant, se précipite à leur rencontre. Il va les atteindre et les terrasser. Rapides comme une flèche, nos braves enfilent une étroite ruelle, puis, pâles comme la mort, ils pénètrent dans une maison voisine, implorant secours et hospitalité jusqu'au lendemain. A la pointe du jour, ils tremblaient encore. Ils n'avaient point dormi.

Une autre fois, la nuit était douce et belle. Au firmament, la lune se promenait, tout en répandant une bienfaisante lueur sur la terre enveloppée par les ombres du crépuscule. Sur l'étroit chemin qui relie Planfayon à Plasselb, un vaillant gars s'avançait gaiement. Arrivé à Ried, il se glisse à pas de loup le long d'une maison tranquille et s'en va frapper à la fenêtre d'une jeune fille, avec laquelle il se propose de causer longuement. Il est vite compris, car la croisée s'ouvre et de douces paroles commencent à s'échanger à voix basse entre les deux intimes. Mais que voient-ils ? Sur un tas de fagots, à dix pas devant eux, un chien, un horrible dogue, aux griffes crochues, les menace de ses dents et de ses murmures sourds et pleins de colère. S'il ne venait que pour les écouter, on lui pardonnerait, mais il est là pour les interrompre brusquement. Aussi le jeune homme, pour éloigner cet importun, saisit un bûche et la lance avec autant de force que d'adresse contre la bête courroucée. Exaspérée, celle-ci se précipite en avant, fait jaillir de sa bouche. écumante des jets de feu et s'apprête à dévorer l'agresseur sous les yeux de sa fiancée presque évanouie. Hors de lui-même, l'infortuné s'enfuit aussi rapidement que le lui permettent ses jambes paralysées par la terreur. Plus agile encore, en trois bonds prodigieux, le spectre le rejoint et lui pose deux pattes sur les épaules aussi lourdement que le ferait une vache grasse du Geisalp. De ses griffes il lui laboure le menton et les joues et le contraint à se traîner ainsi, haletant, demi-mort, pendant un long quart d'heure. A l'entrée du village de Planfayon, à la vue d'une croix, le chien rouge lâche prise et disparaît en grommelant.

Depuis cette lugubre époque, tapageurs de nuit et amateurs de veillée sont restés soigneusement à la maison. De même, aussitôt que le couvre-feu s'est fait entendre, aucune jeune fille n'a osé ouvrir sa fenêtre, craignant de revoir le Gassentoetscher, le hideux et inexorable gardien nocturne.

Plus tard, un homme courageux a réussi à toucher de son chapelet l'étrange apparition, non loin de la tour de Bourguillon. Aussitôt le monstre s'est changé en une chèvre noire, qui devint ensuite blanche et enfin périt dans le cimetière. Depuis ce jour, jamais aucun chien n'a pu s'acclimater à Bourguillon, malgré tous les efforts clairvoyants de la Société protectrice des animaux.


Partager cet article sur :


Je vous propose d'autres légendes de Sense District