Une sage-femme de la ville de Hall était tranquillement couchée dans son lit, une nuit, quand un homme vient l'appeler en toute hâte pour un accouchement. Elle se lève sans retard et le suit, mais voilà qu'elle s'aperçoit avec terreur qu'il dépasse la dernière maison du faubourg et qu'il se dirige vers la rivière la Saale; elle voulut s'échapper, mais ce fut impossible, et bientôt elle voit les flots de la rivière. s'écarter pour leur donner passage, si bien qu'ils purent descendre jusqu'au fond sans être mouillés.
Ils arrivèrent ainsi dans un palais superbe, où la sage-femme trouva une femme en mal d'enfant qu'elle ne tarda pas à délivrer heureusement. Cette femme reconnaissante lui dit : « Je veux vous éviter les embûches terribles auxquelles vous êtes exposée, car mon mari, qui est l'Ondin de la rivière, et qui ne veut pas qu'on s'occupe de nous, fera tout pour vous nuire.
Ainsi, par exemple, il va vous tenter avec de l'or, mais ne prenez que ce que vous avez coutume de recevoir pour votre salaire, sinon vous ne reverriez plus le jour. Ensuite dès que vous toucherez le bord de la rivière, hatez-vous de cueillir de l'origan et du marrube; et quoi qu'il arrive, ne manquez pas de garder les plantes dans votre main droite jusqu'à ce que vous soyez rentrée dans votre maison. »
A peine avait-elle achevé ces recommandations, que l'Ondin entre dans la chambre avec une sébille pleine d'or, en disant à l'accoucheuse « Prenez tout ce que vous voudrez »; mais elle ne prit qu'une seule pièce et même la plus petite.
L'Ondin fut très désappointé et lui dit qu'il allait la ramener au bord de la rivière. Or, comme il passait devant pour écarter les flots, la sage-femme put se baisser et saisir l'origan et le marrube, dès qu'elle fut près de la berge.
Grâce à ces plantes, elle échappa aux embûches de l'Ondin qui, tout mécontent qu'il était, fut obligé de la laisser retourner chez elle, où elle n'entendit plus parler ni de l'Ondin ni de l'Ondine sa femme.