Autrefois il y avait à Estérençuby, sur la frontière d'Espagne, quatre vachers, l'un desquels était un jeune garçon.
Lorsqu'ils étaient endormis, dans leur cabane venait se chauffer Ancho, le seigneur sauvage (Basa Jauna). Et quand il s'était chauffé, il mangeait de leur nourriture. Les bergers recevaient un pain et d'autres mets, et en laissaient un morceau tous les soirs, la part d'Ancho.
Une nuit, voyant que la part n'avait pas été faite, le petit garçon dit : — Où avez-vous la part d'Ancho ? — Donne-lui la tienne si tu veux, lui répondirent les autres. Le garçon laissa sa part sur la planche habituelle. Le seigneur sauvage arriva comme à l'ordinaire. Après s'être chauffé, il mangea la part du petit garçon.
Bien réchauffé et repu, il partit, emportant les vêtements des vachers, sauf ceux du petit garçon.
« Cette nuit là il neigea très fort. Le lendemain matin, les vachers, ne trouvant pas leurs vêtements, dirent au garçon : — Va chercher nos vêtements. — Moi ? non, — Va, nous t'en prions. — Quelle récompense me donnerez-vous ? — Ils avaient une mauvaise génisse et la lui promirent.
Le garçon part, et en arrivant à la citerne où était le seigneur sauvage, il cria : - Ancho, donnez-moi les vêtements de mes camarades. — Tu ne les auras pas — Je vous en prie, donnez-les moi ; ils m'ont envoyé les chercher. — Que te donne-t-on pour ta peine ? — Une mauvaise génisse. - Prends-les donc, et prends aussi cette baguette de coudrier. Marque ta génisse et donne lui cent et un coup, le cent et unième plus fort que les autres.
Le garçon fit ce qu'avait dit Ancho. Il donna à sa génisse cent et un coups, et après un court espace de temps, la génisse lui produisit un troupeau de cent et une belles bêtes.
A cette époque, les seigneurs sauvages conversaient avec les chrétiens.