Deux rivières, en Franche-Comté, portent le nom de Lizon. L'une se jette dans l'Ain, plus bas que St-Claude; l'autre a son embouchure dans la Loue, non loin d'Alaise, au canton d'Amancey. Sur les rives de ces deux cours d'eau, on trouve une tradition populaire que l'on raconte encore diversement dans beaucoup d'autres localités, soit en France, soit à l'Etranger. C'est la tradition du Pont-du-Diable.
Voici [...] la version que l'on donne à Pontoux, au canton de St-Claude (Jura),
Le Lizon est un ruisseau torrentiel profondément encaissé, sur lequel on voulut un jour jeter un pont. Les ouvriers employés à sa construction voyaient avec désespoir les eaux engloutir chaque nuit les travaux de la veille. Ils allaient abandonner leur entreprise, quand le diable leur apparut en personne. Il leur offrit ses services à une seule condition: c'est que le premier individu qui passerait sur la chaussée, quand elle serait finie, lui appartiendrait complètement.
Aidés par le diable, les ouvriers achevèrent leurs travaux avec une promptitude et une facilité merveilleuses. Ce fut alors qu'ils songèrent sérieusement à la promesse qu'ils avaient faite. Livrer un homme, c'était le perdre et se perdre eux-mêmes. Après une longue délibération, l'un d'eux imagina un stratagème très ingénieux. Un rat fut placé sur le pont, et pour l'obliger à le traverser on l'effraya par des cris. Grande fut la surprise et la colère du diable. On lui avait promis le premier individu et non le premier homme, il fallut bien qu'il se contentât de ce chétif animal; mais, dans sa fureur, il enleva la pierre qui servait de clé de voûte.