A quelques pas des ruines de la maison forte d’Usillon, petit fief de la seigneurie de Thorens — dont le nom se marie agréablement à celui que portait l’Apôtre du Chablais, – se trouve, entouré de maisons de chaume et de charbonnières, le pas de la Pierre-Taillée. Le site est assez pittoresque pour qu’un mortel épris de la vie contemplative et dégoûts des biens de ce monde y ait construit son ermitage. Or, un ermitage ne va pas sans sa chapelle, ni une chapelle sans sa légende. L’ermitage de la Pierre-Taillée a l’une et l’autre.
Un jour, un insigne mécréant ayant enlevé de sa niche la statue de la Vierge, la précipita dans le nant, où elle disparut. Mais quel fut l’étonnement de ce misérable, lorsque, le lendemain, il revit la statue à la place qu’elle occupait la veille ! Elle était retournée toute seule à l’endroit d’où elle avait été enlevée.
La Vierge le regarda avec un ineffable sourire de mélancolie, comme pour lui pardonner la profanation commise sur son image. Tout autre aurait dit à son ravisseur confus: – Tu vois que je brave la malice !
Saisi de repentir, cet homme, tombant à genoux devant la statue, lui demanda humblement pardon, et ils continuèrent à vivre ensemble dans les meilleurs sentiments.