La légende des ondines du Mummelsee [Seebach (Freiburg / Allemagne)]

Publié le 13 mai 2024 Thématiques: Créature fantastique , Danse , Date précise , Lac , Nuit , Ondin | Ondine , Sirène ,

Le Mummelsee
Le Mummelsee. Source Norbert Hüttisch, Karlsruhe, CC BY-SA 3.0 <https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0>, via Wikimedia Commons
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Source: Anonyme / Les légendes des environs de Baden-Baden (1870) (2 minutes)
Contributeur: Fabien
Lieu: Mummelsee / Seebach / Freiburg / Allemagne

Bien avant dans les montagnes derrière Bade, entre les vallées de Sasbachwalden et d'Oberkappel, s'élèvent les montagnes de la Forêt Noire septentrionale à la hauteur considerable de 3,800 pieds en se prolongeant sur une longue crête, sur laquelle il n'y a que la bruyère ou une pâle mousse qui recouvre le terrain noir et marécageux qui s'affaisse sous les pas, et où, ça et là, un pin tortu et rabougri trouve à grand, peine la subsistance nécessaire à sa végétation.

Hornisgrinde est le nom de cette contrée inhospitalière, et la pointe méridionale s'appele Grenzberg. C'est là que, sur le versant escarpé de la montagne, encaissé dans des masses de rochers immenses, est un bassin profond rempli d'une eau sombre formant un lac, d'où le Seebach, affluent de la rapide Acher, se précipite dans la vallée. Des sapins gigantesques s'élévent majestueusement entre les énormes débris de rochers jetés pêle-mêle, et l'azur du ciel se réfléchit dans les eaux du lac, dont la surface est aussi calme et immobile que les eaux bitumineuses de la mer Morte. Seulement, de temps en temps, une vague agitée s'élève du fond, et semblable à un soupir qui s'échappe d'une poitrine oppressée, fait jaillir en bouillonnant à la surface, une bulle d'eau qui éclate et fait rider la nappe unie du lac en y formant un petit cercle qui va toujours en s'agrandissant: mais tout autour aucun bruit n'interrompt ce silence éternel, si ce n'est, par fois, le cri rauque d'un oiseau de proie.

Le nom de Mummelsée qui été donné à cette eau d'un aspect sinistre, provient des nénuphars blancs ou sirènes que la légende y fait habiter au milieu de jardins enchantés, semblables à ceux des Hespérides, d'une magnificence printanière merveilleuse et dans lesquels fleurissent la myrte virginale, l'orange odoriférante à côté de fleurs de cristal brillantes, d'un rouge de corail, et de milliers d'autres fleurs de formes et de couleurs qui n'on jamais été vues. Ces ondines ou sirènes ont des figures délicieuses, éthérées, si fines et si délicates, si gracieuses et si ravissantes, possèdent des charmes et des agréments si supérieurs aux choses terrestres, qu'elles semblent formées de l'écume vaporeuse des ondes, revêtues de la blancheur du lis et de l'émail des roses. Tous les mois, à la pleine lune, elles sortent vers minuit de ces ondes obscures et paraissent à la surface en causant et en folâtrant, prennent leurs ébats et nagent en formant un cercle, traversent le miroir de l'eau, en s'agaçant et faisant mille railleries, forment des rondes gracieuses et savourent à longs traits les délices merveilleuses et les charmes de la nuit éclairée par les rayons argentés de la lune, dont elles ne peuvent jouir dans leur séjour des eaux. Mais le chant du coq, à l'approche de l'aurore, annonçant l'arrivée du jour, les rappelle toutes inévitablement dans leur demeure souterraine. Il arrive bien quelque fois que ces nymphes séduisantes s'arrêtent trop longtemps sur la terre des vivants, que les astres de la nuit se dissipent devant les feux du matin, pendant que les charmantes ondines n'en continuent pas moins leur danses gracieuses, et ne s'aperçoivent pas que le vieux génie du lac, à barbe grise et d'une humeur chagrine, sort du fond des eaux à l'aube du jour, qui succède aux brouillards de la nuit, et d'un ton irrité, enjoint à celles qui tardent de rentrer sans délai.

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Source: Engelhard, Maurice / Souvenirs d'Alsace: chasse, pêche, industries, légendes (1890) (2 minutes)
Contributeur: Fabien
Lieu: Mummelsee / Seebach / Freiburg / Allemagne

A quelques lieues de Bade, sur le versant méridional des Hornisgründe, la cime la plus élevée du pays, il existe un petit lac entouré de montagnes escarpées, de blocs de rochers et de sombres sapins. Autour de ses eaux noirâtres la végétation est rare, quelques plantes rabougries, pas une fleur, oiseau, partout un morne silence. Jamais l'on n'a pu sonder la profondeur du lac, jamais une barque n'a glissé à sa surface, jamais ses eaux ne se sont ridées au frétillement d'un poisson. La nappe liquide est couverte de lis et de nénuphars qui ondulent doucement au gré de la brise et laissent échapper comme un léger murmure.

Quand vient le soir, que les feux du soleil se sont éteints derrière la montagne, que la nature se repose dans le silence de la nuit, alors les eaux du lac commencent à s'agiter, des vagues légères se forment, l'écume blanchit les ondes mouvantes; d'étranges lueurs brillent, disparaissent et pétillent encore; des bruits mystérieux se font entendre; peu à peu les sons deviennent plus distincts et enfin résonne sourdement une musique ravissante. Les nénuphars et les lis agités par les flots se balancent avec des mouvements toujours plus rapides. Leurs tiges flexibles s'élèvent, se croisent, s'allongent, et insensiblement elles se changent en jeunes filles aux formes gracieuses, aux longs cheveux blonds épars, presque nues sous une gaze transparente et couronnées de lis et de nénuphars.

Ce sont les nymphes du lac qui, trompant la surveillance paternelle, se sont échappées du palais de cristal qu'elles habitent dans les profondeurs des ondes. Elles viennent prendre leurs ébats au clair de lune et se livrer à la danse sur le gazon du rivage. Les mains entrelacées, elles tournent à la ronde; tantôt elles se balancent avec une molle langueur, tantôt elles précipitent leur course rapide. La lune argente la surface du lac de sa plus douce lumière; les étoiles scintillent de joie en regardant ces évolutions capricieuses; les feux follets cherchent à les imiter en sautillant sur l'herbe; les noirs sapins se penchent pour mieux les voir et les eaux du lac murmurent une mélodie étrange qui sert de rythme à la danse nocturne.

Mais le plaisir fait oublier le temps. Les nymphes, livrées avec ardeur à leurs jeux folâtres, ne voient pas l'aurore aux doigts de rose qui entr'ouvre les portes de l'orient. La lune a pâli, les feux follets se sont éteints, les clartés blafardes du matin blanchissent la cime des arbres et les rieuses jeunes filles dansent encore.....

Tout à coup, les eaux du lac bouillonnent et s'ouvrent. Le Neptune de cette mer des montagnes s'est aperçu de l'absence de ses filles et vient les rappeler auprès de lui. Sa tête apparaît à la surface du lac; ses cheveux en désordre et sa longue barbe blanche sont emmêlés d'herbes et de roseaux. Il fronce le sourcil et menace du doigt, pendant qu'une subite rafale gronde dans les airs. A cette vue, les nymphes s'arrêtent. Leurs joues colorées de rose par l'émotion de la danse redeviennent d'une pâleur livide. Elles accourent tremblantes et se plongent à la hâte dans le lac dont les eaux se referment sur elles.

Le premier rayon du soleil levant irradie à l'horizon, les eaux sont redevenues calmes, et à l'endroit où les nymphes ont disparu les lis et les nénuphars ondulent doucement au gré de la brise du matin, en laissant échapper un léger murmure, écho des plaintes que chuchotent les nymphes au fond du Mummelsee.


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