Vers l'an 1470, aux environs du village de Lestelle, riverain du gave de Pau, des pastours virent, plusieurs nuits de suite, une flamme longue, resplendissante, et qui ne brûlait pas, jaillir toute droite, d'un monticule, et y persister jusqu'à l'aube. Ils fouillèrent, découvrirent une statue de la Vierge. On lui bâtit une chapelle, où elle multiplia les miracles.
Ce fut l'un de ces prodiges qui valut au pèlerinage sa dénomination actuelle. Vincent de Bataille, poète béarnais célèbre en son pays, a chanté cela en strophes harmonieuses.
Une jeune fille, butinant des fleurs sur les bords du Gave, tomba dans le courant. Elle allait être entraînée, broyée sur les galets, lorsqu'elle avisa, baignant dans l'eau à sa portée, une branche d'arbre (beth ram, beau rameau). Elle s'y accrocha et put gagner la rive.
Ce sont là des éventualités qui sortent tellement de l'ordre de choses auquel la vie nous habitue, et qui passent à tel point la compréhension humaine, que l'on est évidemment obligé d'y confesser une manifestation du surnaturel.
La chapelle fut incendiée, pendant les guerres de religion, qui furent atroces en Béarn, par les troupes du comte de Montgomery. Mais la foi en Notre-Dame de Bétharram était déjà très répandue, ainsi qu'en témoigne le fameux cantique (Nouste-Dame deü cap deü Poün, etc.) que la mère de Henry IV (lou Nouste Henric!) chantait pendant les douleurs de l'enfantement.
La statue ayant été emmenée tra los montes, à Saint-Jacques, où elle gîte encore, l'évêque de Lescar, ou l'archevêque d'Auch, je ne sais plus lequel, en donnèrent une autre, vers 1615, et firent reconstruire la chapelle, cette fois au sommet d'une colline, (un petit Montmartre !) Peu après on établit pour monter à ce calvaire une route le long de laquelle, de distance en distance, on marqua chaque station du chemin de croix par une église.
A l'heure qu'il est le pèlerinage est plus en vogue et plus riche que jamais.
Vous estimez, n'est-ce pas, et moi avec vous, que voilà, pour une statue, une histoire suffisamment accidentée. D'autant plus que, n'ayant point la prétention de... dictionnariser, je vous ai fait grace d'un volume de détails.
Ce qui n'empêche que l'on vous contera, ce que j'ai recueilli là-bas de maintes bonnes gens, à savoir que Notre-Dame résidait jadis sur la rive adverse, et puis qu'un jour, toute seule, on ne se rappelle perdiou plus pourquoi, il lui a pris fantaisie d'enjamber le gave pour venir s'installer là où on la vénère à présent.
Si l'on vous parle ainsi, eh bien, réflexion faite... je vous conseille de dire à Notre-Dame de Bétharram cette prière :
– Voici des hommes que les chuchotements du Drac ne parviennent point à jeter en de douloureuses méditations; en voici qui ne l'entendent même point, ce méchant Drac. Oh! Notre-Dame, si vous saviez combien j'envie leur tant douce quiétude!