Voici de quelle manière on raconte la mort d'une Vouivre qui venait autrefois se désaltérer à la source qui fait jouer le moulin de Condes. Un homme courageux de ce pays voulut un jour s'emparer du diamant de la Vouivre pendant le temps qu'elle mettait à étancher sa soif : car on sait que la Vouivre dépose son œil unique sur le gazon du rivage avant de se pencher sur l'eau. A cet effet, notre homme imagina de se blottir sous un cuvier et de poser ce cuvier sur le diamant merveilleux. Le stratagème réussit. La Vouivre, à son retour, ne trouvant plus son œil, se précipite avec fureur contre le cuvier. Mais le rusé villageois avait tout prévu; il avait hérissé son cuvier de grands clous dont les pointes se présentaient en dehors; et c'est en s'y blessant à plusieurs reprises que l'aveugle serpent succomba.
L'Ulysse de Condes jouit bien peu de temps de sa victoire : il mourut le lendemain. Quant au diamant, nul ne sait ce qu'il devint. Chose certaine, disent les primitifs du lieu, c'est que là Vouivre n'existe plus, qu'elle s'est tuée à Condes, et que ceux qui prétendent l'avoir vue depuis sont d'impudents menteurs.