Gargantua n'est pas sorti tout entier du cerveau de Rabelais, car, bien longtemps avant le joyeux curé de Meudon, il s'était assis entre Hièvre et Baume-les-Dames, sur le rocher appelé depuis Fauteuil de Gargantua. Là, ayant eu soif, il avait avalé d'un trait le Doubs, qui coule aux pieds de ce siège digne d'un géant.
Qui ne connaît encore aux environs de Clairvaux le Rocher de Gargantua? Ici, la tradition raconte qu'un jour ce géant marchait à grands pas sur nos montagnes ; que, pressé par la soif, il voulut boire au Drouvenant, ruisseau qui descend de la gorge de la Frasnée à la rivière de l'Ain. Afin de se désaltérer plus à son aise, il sépara ce rocher du reste de la montagne pour trouver la source. Sa soif était tellement ardente, qu'il tarit cette source qu'il trouva, et qui auparavant alimentait une rivière. En écartant le rocher, l'empreinte des cinq doigts du géant y forma des excavations qui sont encore aujourd'hui reconnaissables. Cette roche nue, perpendiculaire et très-élevée, est à gauche du chemin de Clairvaux à Crillat, sur la vallée de Nans et en face d'une aiguille de rocher appelée le Prin pela, expression que Monnier traduit par le petit pilier.
Une vouivre hante aussi la roche de Gargantua. La tradition locale dit qu'elle vient se désaltérer chaque soir à la fontaine appelée Sous-les-Banchets.