La légende du coin des quatres diables de Florence [Firenze / Città Metropolitana di Firenze / Italie]

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Publié le 11 octobre 2025 Thématiques:

Diavolino de Giambologna
Diavolino de Giambologna. Source Sailko, CC BY 3.0 <https://creativecommons.org/licenses/by/3.0>, via Wikimedia Commons
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Source: Leland, Charles Godfrey / Legends of Florence: Collected from the People, Volume 2 (1896) (2 minutes)
Contributeur: Fabien
Lieu: Diavolino de Giambologna / Firenze / Città Metropolitana di Firenze / Italie

Il était une fois à Florence une grande famille dont la mère et l’unique fille, Lucia, étaient, pour ainsi dire, bonnes comme des saintes ou des anges, et aimées de tous.

Mais tout aussi bonnes qu’étaient celles-ci, le père et les trois frères de Lucia étaient mauvais en tout, des hommes dont l’infamie commençait où finit celle des pires, haïssant tout bien : des âmes damnées de leur vivant, et des corps maudits.

Et comme ils prenaient leur plus grand plaisir à tourmenter tout ce qui vit, ils accablaient de vexations leur mère et leur sœur.

En vérité, ils n’épargnaient personne : ils entraient en fureur si le soleil se couchait sur une journée où ils n’avaient pas mis à mort ou fait mettre à la question quelque être humain, ou rendu fou quelque pauvre diable. Ils étaient des malédictions vivantes.

Lucia pourtant se fiança, malgré eux, à un jeune noble de rang et de condition convenables. Alors le père et les trois frères commencèrent à le calomnier et à l’injurier auprès d’elle, jurant qu’ils le tueraient, d’une manière ou d’une autre, si l’on trouvait à Florence acier ou poison.

Un jour cependant ils lui dirent, d’un ton mielleux qui éveilla fort la défiance de Lucia :
— Nous avons réfléchi à tes fiançailles et pensons qu’il vaut mieux être en bons termes avec ton bien-aimé. Aussi l’avons-nous convié ce soir à souper.

Ils avaient, avec grand art, préparé une figure absolument semblable à celle du fiancé, vêtue à son ordinaire, et un visage de cire qui en était le portrait parfait — mais comme celui d’un mort, livide.

Lorsque Lucia entra, ils la conduisirent vers cette image avec force révérences ; puis, éclatant d’un grand rire :
Ecco ! le voilà, mort comme une pierre. Nous avons fini par l’empoisonner. Touche-lui donc le visage, tu verras comme il est froid ! Il ne dira plus un mot. Mort sans prêtre.

Lucia toucha et baisa en effet ce visage, sans s’apercevoir que c’était de la cire ; là-dessus, le père et les frères repartirent d’un rire grossier, s’assirent à table, se mirent à boire et à chanter l’office des morts, entrecoupé de paroles ordurières ; tandis que Lucia, d’horreur et d’angoisse, s’enfuyait avec sa mère dans leur chambre, où les pauvres âmes prièrent Dieu de tout leur cœur, leur misère ne semblant pouvoir aller plus loin.

Or, tandis qu’elles pleuraient et priaient, il leur apparut un vieillard d’aspect très vénérable — elles surent qu’il ne pouvait être qu’un saint — entre deux anges ; et il leur dit :
— Levez-vous à l’instant et quittez cette maison infâme ; n’y revenez point qu’elle n’ait été purifiée par le feu du châtiment. Allez dans la demeure d’en face et, de là, regardez ici.

Elles obéirent ; et, de la maison d’en face, elles virent des flammes rouges emplir tout leur palais, des formes de démons voltiger dans le brasier, et elles entendirent les hurlements des quatre misérables coupables — le père et ses fils.

Quand tout fut fini et qu’elles revinrent, il ne restait nulle trace d’incendie, sinon quelques os noircis et calcinés des quatre qui avaient été si cruels.

Et voici que parut aussitôt le fiancé de Lucia : pour elle, c’était comme un ressuscité — car nulle joie n’égale celle de recouvrer ce que l’on croyait perdu ; ils furent bientôt unis et vécurent heureux.

Quant aux quatre méchants, ils furent changés en quatre diables de bronze qui se voyaient jadis à l’angle de l’ancien palais — dont l’un demeura jusqu’à sa démolition. On appelait cela le Diavolino.


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