[...] Anglais d'origine, [Saint Clair] passa la Manche et s'établit quelque temps à Cherbourg, dans une maison située à l'angle de la rue des Moulins et de la place de la Révolution, qui se faisait remarquer, avant qu'on l'eût reconstruite, par des touffes de giroflées à fleurs jaunes, capricieusement éparses sur les murailles. Puis, trouvant la ville trop bruyante, il se retira dans une forêt qui s'étendait à l'ouest de Cherbourg sur la côte, et se fit bâtir un ermitage à Nacqueville. L'ermitage a disparu, mais on a construit sur l'emplacement une chapelle qui existe encore, et autour de laquelle il se tenait autrefois une assemblée, la plus fréquentée des environs de Cherbourg. L'assemblée a été transportée depuis sur un autre point du littoral et la chapelle se trouve au milieu de champs cultivés.
Clair avait espéré vivre tranquille dans cette solitude. Il n'en fut rien. Une noble dame s'éprit de lui; Clair ne partagea pas cet amour et s'enfuit en Haute-Normandie, prêchant, évangélisant sur son chemin. Mais là encore la dame le poursuivit, et deux hommes qu'elle envoya à sa poursuite furent chargés de le lui ramener mort ou vif. N'ayant pu le décider à revenir, il lui coupèrent la tête. Le saint la ramassa et l'emporta aux yeux de ses bourreaux effrayés, qui n'osèrent le suivre. On place ce meurtre et ce miracle sur le bord de l'Epte, en 1881, au lieu qui s'est appelé depuis saint Clair-sur-Epte et où fut conclu plus tard le traité par lequel Charles le Simple cédait la Neustrie aux Normands.