En 1764, deux vignerons d’Ehnen — Peter Kohl et Wilhelm Kiefer — remontaient la Moselle dans une petite barque, chargée de raisins. Arrivés au niveau du barrage, à une vingtaine de mètres en aval d’Ehnen, leur embarcation menaça soudain de sombrer. Dans cette extrême détresse, les deux vignerons s’adressèrent au saint patron des bateliers, saint Nicolas, et firent vœu que, s’ils en réchappaient, ils installeraient une image du saint sur la rive de la Moselle et y placeraient chaque année, le 6 décembre, une bougie allumée.
Et voilà que, à peine avaient-ils prononcé leur vœu, que la barque, comme guidée par une main invisible, glissa doucement sur les flots, se retourna et repartit en dérivant vers l’aval. Les vignerons étaient sauvés.
Quelques mois plus tard, une belle statue en bois de saint Nicolas fut placée dans une niche creusée dans un mur construit sur la rive droite de la Moselle. Depuis lors, chaque année à la fête de saint Nicolas, les descendants des deux hommes y déposent une bougie allumée. Aujourd’hui, la statue se trouve dans une sorte de petite chapelle creusée dans le rocher.
Quelques années plus tard, la Moselle en crue emporta la statue. Des pêcheurs la virent dériver debout, calmement, sur les eaux en aval de Wormeldange. Ils reconnurent la statue et la rapportèrent à Ehnen.
Au début du XIXe siècle, alors que les troupes françaises battaient en retraite depuis l’Allemagne et traversaient en partie le pays, des soldats tirèrent sur la statue. Encore aujourd’hui, un trou de balle est visible dans le manteau du saint.
Les enfants du village croient que saint Nicolas prépare ses friandises pour eux de l’autre côté de la rivière, lorsqu’ils voient la bougie briller devant sa statue les soirs qui précèdent sa fête.
Les bateliers, lorsqu’ils passent devant la statue, ôtent respectueusement leur casquette, interrompent leur langage ordurier et semblent prier.