Pour ce qui est du détroit de Gibraltar, phénomène géographique très remarquable, bien fait pour frapper l'esprit de ceux qui aiment à penser. Et que les hommes de l'école de Reclus, c'est-à-dire qui étudient la topographie de notre planète d'une manière synthétique, comme un corps vivant, examinent avec le soin que les anatomistes et les physiologistes apportent dans leurs dissertations; les anciens bâtirent une fable, sous les allégories de laquelle, se trouve peut être une réalité imposante. Voici cette fable empruntée à Diodore de Sicile.
« Hercule parcourut la Lybie jusqu'à l'Océan qui baigne Gadès, et il éleva deux colonnes sur les bords de l'un et l'autre continent. Nous dirons un mot des colonnes d'Hercule dont nous venons de faire mention. Arrivé aux extrémités de la Lybie et de l'Europe, Hercule érigea ces colonnes sur le bord de l'Océan, pour laisser un souvenir immortel de son expédition; il en rapprocha, dit-on, par une digue, les extrémités des deux continents qui étaient autrefois très distants l'un de l'autre et il ne laissa aux eaux de la mer qu'un passage étroit empêchant les cétacés de l'Océan d'entrer dans la mer intérieure ouvrage immense qui perpétua la mémoire d'Hercule. Quelques-uns, au contraire, prétendent que les deux continents étaient joints, Hercule perça l'isthme et forma ainsi le détroit qui fait aujourd'hui communiquer l'Océan avec notre mer. Chacun est libre d'adopter l'une ou l'autre de ces deux opinions. Hercule avait déjà fait un travail semblable en Grèce. La vallée appelée Tempé était couverte d'eaux stagnantes dans une grande étendue; il creusa un canal par lequel s'écoulèrent ces eaux et fit ainsi apparaître la plaine de Thessalie, arrosée par le fleuve de Persée. »