Il existait autrefois aux environs de Châtenois une croix votive à l'aspect de laquelle on racontait, en se signant, cette tragique aventure :
Catherine de Châtenois était une jeune fille belle et vertueuse. Elle menait une vie exemplaire lorsque Mathieu, surnommé le physicien, revint du Caire à Châtenois, son pays natal. Le retour de cet homme alarma tout le village, car il avait grand bruit de mauvais renom, et sa figure était repoussante. Catherine, soit que le physicien l'eut ensorcelée, soit que son amour fut l'effet d'un aveugle caprice, conçut la passion la plus vive pour cet homme. Elle repoussa tous les avertissements salutaires qui lui furent donnés à cette occasion. La veille de Noël, Catherine et Mathieu se promenaient le soir tête-à-tête, selon leur coupable habitude. Ils oublièrent la messe de minuit dans leur criminelle conversation. Un remords soudain troubla le cœur de Catherine, et Mathieu lui-même parut ému, quand tout-à-coup un coq chanta trois fois. «Minuit! ô ciel, ai-je oublié !........ Minuit! » s'écria Mathieu l'air effaré et la bouche béante. Catherine éperdue se soutenait à peine, il lui semblait que la main de Mathieu devenait une griffe et lui déchirait la poitrine. Par un dernier effort, elle tourne vers lui un œil mourant. Vision épouvantable! le visage du réprouvé n'est plus un visage d'homme, c'est un affreux museau de loup, une large gueule pleine de sang et d'écume. L'infortunée se meurt, et une dent meurtrière brise son cou d'ivoire.
Le lendemain, on trouva dans ce lieu des os, des cheveux et un débris de vêtement qui avait appartenu à Catherine. Ses parents élevèrent sur la place même la Croix votive de Châtenois.
Les croyances populaires que l'on rencontre dans tous les lieux anciens se retrouvent à Châtenois encore toutes vivaces. On y raconte sérieusement qu'on a vu le loup-garou et entendu le sabbat au-dessus des Combattes.